(m) DON'T YOU FORGET ABOUT ME – PRIS

(COMME DES ENFANTS) Un, deux, trois. Baskets aux pieds, la gamine s'élance, les poumons pleins d'airs. Elle court, très vite, bien plus que la petite brune derrière elle, mais pas assez pour rattraper le frère de cette dernière. Le garçon touche le mur en premier et se tourne vers les deux autres, on ne peut plus fier. « J'ai gagné ! » s'écrit-il, tandis que les filles arrivent enfin à sa hauteur. « C'est pas juste ! » Les lèvres de la blonde s'étirent en une moue, dont elle seule semble avoir le secret. Elle était mignonne, quand elle faisait cette tête, lui disait-on souvent mais Margo, elle, ne voulait pas avoir l'air mignonne. Elle était contrariée et il fallait que cela se sache. « Tu gagnes tou-jours. » Les bras croisés sur son torse, elle toisait son ami d'un air peu ravi. « Tu es plutôt une mauvaise perdante, enfait, toi, non ? » rétorqua le môme d'un ton railleur. Margo secoue la tête, marquant ainsi son désaccord. Ses boucles blondes virevoltent au même instant et brillent au soleil, un phénomène qui émerveillait toujours les jumeaux Barclay. « Et toi, un mauvais ami. » Et toc. La tête haute, Margo tourne les talons. Si il en est ainsi, elle part.  « Mais Margo, reviens ! » L'interpellée fait mine de ne rien entendre et continue son chemin. Le petit brun attrape sa main, avant qu'elle ne s'éloigne trop loin. « Arrête de faire la tête, t'es pas jolie quand tu boudes. En plus, on a dit qu'on est amis pour la vie. » Si il y a bien une personne contre qui Margo ne peut rester fâchée plus de deux minutes, c'est bien Ace. Il y avait ce truc chez lui, quelque chose qu'elle ne pouvait expliquer. C'était tout bonnement plus fort qu'elle. « Tu sais, dans la vie, parfois on perd, mais après on se relève et on gagne. C'est ce que mon grand-père dit, en tout cas et généralement, il dit des trucs intelligents. » Il sourit, Ace, avant de s'éloigner en trottinant. « Si tu veux, on fait une revanche ! » Margo souffle un bon coup et remonte ses manches, avant de courir le rejoindre. La journée passe si vite, aux côtés des Barclay. Tout est beau, tout est simple, avec eux. Lorsqu'elle retrouve la villa des Duchannes, Margo ne ressemble à rien, du moins, c'est ce que sa mère lui dit, en s'égosillant. Ses cheveux sont trempés, son visage marqué par la terre dans laquelle elle s'est roulée et sa petite salopette griffée Dior est trouée au genou droit. Mais de tout cela, Margo, elle s'en fiche bien. Elle est heureuse. Il y a que cela qui compte.

(ENSEMBLE) Margo se réveille, doucement Elle ôte son masque de nuit et sursaute. La tête du chauffeur de bus n'est qu'à une quinzaine de centimètres de la sienne. « Et bien, gamine, t'as le sommeil lourd. Ça fait cinq minutes que je te secoue le bras. On est arrivé. » Elle marmonne un simple merci, avant d'attraper ses deux sacs-à-dos et sa valise, représentant l'intégralité de ses biens. Le regard de la jeune femme se perd dans les alentours, alors qu'elle quitte le véhicule. Les Hamptons semblent être comme autrefois, comme dans son souvenir. Margo n'a pas besoin de sortir le post-it de sa poche, elle connaît l'adresse recherchée par coeur. La valise roule sur le sol et se prend parfois dans le gravier. Au fil de ses pas, Margo se souvient, de tous ses étés, passés ici-même. Elle se souvient des courses avec Ace. Des colliers de fleurs avec Neve. De leurs baignades, en plein soleil. De leurs fous-rires. De cette dispute, au bord de la mer et de son coeur que les mots d'Ace brisèrent. Elle ne sait même pas, pourquoi elle revient. Pourquoi elle est ici, devant chez lui. Par désespoir sûrement. Pourtant, là voilà, le coeur battant. Les doigts à quelques centimètres de la sonnerie et pourtant, hésitants. Elle se décide, enfin et une douce mélodie signale sa présence, de l'autre côté de la porte. « Margo ? » Il est là. Devant elle. Bordel, ce qu'il a changé. Enfin, ce qu'il a l'air plus âgé. La magie de la puberté, sûrement. Il a l'air d'un homme, d'un vrai, avec sa barbe de trois jour. Mais il a toujours ce regard malicieux, qui lui faisait ressentir quelque chose, avant. Et peut-être encore aujourd'hui. « Excuse-moi, je dérange, sûrement mais j'avais nulle part où aller. » Elle se sent bien bête, devant le pas de sa porte, sa vie et ses ennuis sur le dos. Elle avait espéré, malgré leurs différents d'adolescents, qu'il se souviendrait de leur promesse d'enfants. Même si Margo restait la garce superficielle qu'il ne pouvait plus supporter. Même si Ace restait le paumé qu'elle avait fait semblant de mépriser. Amis pour la vie, qu'ils s'étaient dit.